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11.12.19

Comment faire face aux repas des fêtes

Nutrition
Les fêtes de fin d’année sont pour beaucoup synonymes de repas copieux ou d’écarts par rapport à leurs habitudes alimentaires. Une situation qui, au-delà du plaisir immédiat, peut engendrer stress et culpabilité chez ceux et celles qui cherchent à surveiller leur alimentation. Alors, comment manger pendant les fêtes sans se torturer l’esprit et faire face à ces quelques écarts ? Nous y répondons avec Noémie Lanier, psychologue au centre de l'obésité de l’Hôpital de La Tour.

 

Pour certaines personnes, la perspective des repas de fêtes peut être une source d’anxiété davantage qu’un plaisir. Comment y faire face ?

Dans ma pratique, je cherche justement à déconstruire ce type de culpabilité. Dans ce cas précis, elle est liée à une situation exceptionnelle. Elle se met généralement en route parce qu’il y a restriction le reste de l’année. On s’est interdit certains aliments pendant des mois, et soudainement, on arrive dans une période à risque et on ne sait pas si l’on pourra la gérer et si l’on tiendra le coup. En réalité, c’est souvent cette approche qui est source d’anxiété. Il faut écouter son corps et ses sensations, ce qui permet d’être plus serein et de réguler son alimentation de manière plus naturelle.

Donc le stress auquel on se soumet dans ces périodes où l’on mange plus que d’habitude vient d’un problème plus général?

Chaque cas est différent, mais en tout cas, se mettre dans les interdits crée une tension. Cette tension à son tour crée une tentation, qui va vous faire y penser beaucoup plus. C’est comme si l’on vous demande de ne pas penser à un éléphant rose, vous n’allez visualiser que ça. Le résultat sera souvent ce que l’on appelle communément un craquage, qui vous entraînera dans un cycle négatif. Vous vous direz « fichu pour fichu, j’ai craqué, donc je finis le paquet, je me ressers encore »… Ce qui vous fera vous sentir encore plus coupable et penser que vous êtes faible, que c’est une catastrophe.

A l’inverse, si vous ne vous êtes pas vous-même imposé des interdits stricts, vous n’allez pas créer le même rapport, ni cette tension. Je ne dis pas que c’est facile, mais si vous vous dites « ah, j’aime bien ça et j’y ai droit, je vais simplement en manger à ma faim », vous mangerez le plus souvent raisonnablement. Votre manière de vous nourrir s’adaptera dans la plupart des cas à votre faim et vous permettra de réguler naturellement sur le repas d’après.

Bien sûr, à certains moments dans nos vies, nous mangeons plus, mais l’essentiel est de savoir s’arrêter lorsqu’on est rassasié. La source de la culpabilité, c’est le plus souvent cette relation binaire que l’on peut avoir, où certains comportements sont fondamentalement mauvais et d’autres idéalisés. La réalité n’est pas aussi simple.

Les fêtes ne sont donc un problème que si l’on veut que c’en soit un?

Même si l’on a décidé de manger mieux ou de manger moins, j’ai du mal à croire que l’on peut tout faire échouer sur une semaine et quelques gros repas. Ce n’est vraisemblablement pas ça qui va tout faire basculer. En revanche, ce qui est vrai c’est que si vous êtes dans une restriction le reste du temps, si vous changez drastiquement votre alimentation soudainement, votre corps va réagir. Par exemple, si vous ne mangez jamais de sucre mais que vous ne faites que ça pendant une semaine, il aura du mal à suivre.

Excès et privation sont aussi négatifs l’un que l’autre?

En réalité ils vont souvent ensemble. Il y a une danse entre les deux. Si vous vous dites « Ca y est, je fais un régime » et que vous vous imposez un effort et une privation extrême, au bout de quelques mois on observe souvent un relâchement. Vous n’irez pas forcément dans l’excès tout de suite, mais des comportements compulsifs peuvent se développer à cause des privations et des frustrations. Il faut partir du principe que votre corps sait assez bien faire les choses si vous l’écoutez. Il se régule bien. On peut avoir du plaisir en écoutant les limites de son corps ! D’ailleurs on ne se sent pas bien quand on est dans l’excès ; on est ballonné, on digère mal… On n’en retire pas de satisfaction.

Donc plus que se demander comment réagir pendant les fêtes, il faut adopter un comportement constant toute l’année.

Plutôt, oui. Tout cela devrait finalement se réguler dans l’ensemble et permettre de traverser une période comme celle-là sans obstacle insurmontable. Après, évidemment, cela diffère pour chacun et cela dépend de questions plus vastes, de l’ordre de « pourquoi je mange ». Qu’est-ce que ça me procure, quelle fonction ça remplit ? Nous sommes dans un siècle où on ne mange plus prioritairement parce qu’on a faim, ce qui crée des situations nouvelles, des troubles nouveaux.

En résumé, pour appréhender des périodes de grand écart dans nos pratiques alimentaires, l’important c’est de garder du plaisir?

C’est un bon point de départ. Si l’on mange trop et qu’en plus on s’en veut, il n’y a pas grand-chose de positif. Le plaisir n’a pas besoin d’être lié à l’excès. Ce n’est pas seulement le contenu de l’assiette qui peut poser problème, c’est la quantité. En mangeant en fonction de ce dont on a besoin, on peut s’autoriser ensuite à sauter le dessert, à ne pas prendre de petit-déjeuner. Pas pour compenser, ce qui ne change rien et aura bien souvent des effets négatifs également, mais parce qu’on n’a pas faim.

La pression sociale peut aussi être un piège. Si vous êtes rassasié, essayez de ne pas vous forcer de peur que l’on croie que vous n’aimez pas, ou d’avoir l’air impoli. On peut avoir du plaisir, partager avec ses proches, mais quand même se dire qu’on a eu assez. Assumez de dire que oui, c’était bon, merci, mais vous n’avez plus faim.

Tant que vous ne vous frustrez pas et que vous n’exagérez pas non plus, tout devrait bien se passer. Les fêtes, ce ne sont dans la plupart des cas que trois ou quatre repas, il ne faut pas en faire un drame!